Du champ à l'assiette, les systèmes alimentaires génèrent près d'un tiers des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. L’agriculture industrielle épuise la nature et pollue. Elle incite à une trop grande consommation de viande, à la production de déchets et au gaspillage. Il existe pourtant des leviers d'action pour rendre l’alimentation saine et durable. À condition que tout le monde s’y mette.
Les systèmes alimentaires dans leur ensemble sont à bout de souffle. Le modèle agricole dominant, basé sur la productivité et les produits chimiques n'est pas durable. Le secteur de l’élevage est responsable à lui seul de 12 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial selon la FAO, l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation, à cause des rots et des pets de vaches notamment. La production d’engrais chimiques, à partir d’énergies fossiles, pèse également dans le bilan carbone de l’agriculture, tout comme la déforestation massive pour produire les aliments pour le bétail, qui affecte les puits de carbone naturels en plus de la biodiversité. Les pesticides polluent l’environnement et l'irrigation représentent 70 % de la consommation d'eau douce mondiale.
À l’autre bout de la chaîne, dans l’assiette, la malbouffe entraîne obésité, cancers, diabète… Alors qu'en parallèle, une personne sur 11 souffre de la faim dans le monde.
Heureusement, il existe des leviers pour faire évoluer nos systèmes de production et d’alimentation.
Les agriculteurs peuvent diversifier leur production dans chaque ferme, multiplier les types de semences pour favoriser la biodiversité, notamment aller vers l'agroécologie pour résister aux effets du changement climatique et limiter les besoins en produits chimiques, réutiliser les fumiers pour enrichir le sol au lieu de les jeter à la mer et polluer l'eau.
L'industrie et la publicité ont également un grand rôle à jouer, en mettant en avant les produits sains, locaux, issus d’exploitations responsables et surtout avec des prix bas pour les rendre accessibles au plus grand nombre. Le prix est d'ailleurs le principal argument d'achat pour la plupart des gens qui vont faire leurs courses au supermarché.
Autre levier : faire attention au gaspillage. Quelque 30 % des superficies agricoles du monde servent chaque année à produire de la nourriture gaspillée par les consommateurs ou que l’industrie égare, entre deux étapes de transport ou de transformation.
Il va aussi falloir se résoudre à moins manger de viande et de produits laitiers dont la production impacte tant la planète, en particulier dans les pays riches et à revenus intermédiaires. Chaque Français consomme plus de 84 kg de viande par an ; aux États-Unis c'est 127 kg par personne et avec la hausse du niveau de vie en Chine, la consommation de viande a bondi à 65 kg par personne et par an aujourd'hui. À l'autre bout du classement, c'est en Éthiopie, avec un peu plus de 5 kg de viande par personne chaque année, qu'on en mange le moins.
ONG et chercheurs plaident pour manger moins de viande, mais mieux, en favorisant les viandes de qualité, issues d’élevages responsables et en valorisant les repas à base de légumineuses.
Ce changement ne doit pas reposer sur les consommateurs seuls, et l'action collective de toute la chaîne de production est cruciale pour réussir, y compris celle des pouvoirs publics et malgré les très puissants lobbys de l'industrie agroalimentaire qui n'ont pas intérêt au changement et qui usent de tout leur poids pour convaincre les responsables politiques. S’il y a eu de grandes avancées en Europe par exemple avec le Pacte vert, on voit depuis plusieurs mois un fort recul de l'ambition européenne pour rendre l'agriculture et l'alimentation saines et durables.