Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump multiplie les appels du pied à destination de Kim Jong-un en affirmant qu’il souhaite reprendre le dialogue. Mais le dirigeant nord-coréen reste pour l’instant insensible. Ce mercredi il apparaissait dans les médias d’État en train de déambuler dans une usine d’enrichissement d’uranium, plaidant pour la poursuite de son programme nucléaire. Mais est-ce que le retour de Donald Trump, qu’il a rencontré à trois reprises, peut le faire changer de politique ? Est-ce que les deux hommes qui ont fait naître l’espoir d’une fin pacifique au conflit qui divise la péninsule depuis 1948 vont-ils à nouveau débuter des négociations ? RFI a posé ces questions à Jenny Town, directrice du site 38 North, programme d’analyse de la Corée du Nord géré par le groupe de réflexion Stimson Centre. RFI : Depuis son arrivée à la Maison Blanche, Donald Trump a multiplié les déclarations à l’égard de la Corée du Nord, assurant notamment qu’il souhaitait reprendre le dialogue. Est-ce que vous le prenez au sérieux ?Jenny Town : Je pense qu’avec Donald Trump il vaut mieux regarder la direction qu’il tente d’indiquer et pas nécessairement se concentrer précisément sur ses mots. Son intérêt pour la Corée du Nord est clair. Il veut reprendre les négociations, sous une forme ou une autre. Mais à quoi est-ce que cela ressemblera ? Quand est-ce que cela peut se dérouler ? Tout reste incertain. Je sais que Donald Trump a par exemple parlé de la Corée du Nord comme d’une « puissance nucléaire », ce qui serait un changement majeur. Mais ensuite, la Maison Blanche assure que la dénucléarisation de la Corée du Nord est toujours un objectif. S’il y a une chose que l’on peut retenir de la première administration Trump, c’est que le président n’est pas connu pour sa précision et nous ne pouvons pas interpréter chacun de ses mots comme étant révélateur d’une intention précise.Kim Jong-un semble dans une position de force, est-ce qu’il a réellement un intérêt à revenir à la table des négociations ?Je pense que tout dépend de la crédibilité que Kim Jong-un accorde à de nouvelles discussions. Il n’a pas exprimé d’intérêt pour l’instant, il n’y a aucune urgence pour la Corée du Nord de négocier avec les États-Unis et surtout peu de compréhension sur la base sur laquelle se dérouleraient des négociations. Il y a des chances que dans les prochaines semaines, la Corée du Nord décide d’agir pour montrer à Donald Trump que le pays n’est pas le même qu’en 2017, lorsqu’il est arrivé au pouvoir pour la première fois. Maintenant Kim Jong-un se voit plus fort politiquement, militairement et dans une très bonne position. Je pense qu’il va insister sur les capacités qu’il possède, des capacités balistiques intercontinentales, des satellites de reconnaissances. Tous ces éléments qu’il a annoncés dans son plan quinquennal, et qui risquent d’agacer les États-Unis et pourraient faire en sorte qu’ils les prennent au sérieux. C’est clair pour Kim Jong-un que Donald Trump veut négocier, mais est-ce que cela sera au sujet de la dénucléarisation ? J’en doute.Quand on sait que la Corée du Nord possède selon les estimations au moins cinquante ogives nucléaires, pourquoi est-ce que le pays envisagerait de négocier ? Qu’est-ce que les États-Unis pourraient leur proposer pour les faire changer d’avis ?Des discussions sur la fin du programme nucléaire semblent improbables, pas seulement à cause des capacités actuelles de l’armée nord-coréenne mais aussi parce que le statut nucléaire de la Corée du Nord est inscrit dans la Constitution du pays. Peut-être qu’ils sont ouverts pour discuter à la marge, mais nous ne sommes plus en 2017. La Corée du Nord ne va pas revenir à la table des négociations et dire : « D’accord, nous sommes prêts à nous engager sur la dénucléarisation et on va remettre notre relation sur des bons rails ». C’est juste impossible.L’autre problème est qu’une discussion sur le contrôle des armements doit comprendre deux éléments compliqués : d’abord cela suppose un processus mutuel avec des concessions des deux camps. Mais surtout il faut un niveau de transparence extrêmement élevé, presque supérieur à ce que requiert une dénucléarisation. Mais nous n’avons aucune idée des quantités de missiles dont dispose la Corée du Nord parmi tous les systèmes qu’ils nous ont présentés ces dernières années. On ne sait pas combien ils ont fabriqué, ce qu’ils ont déployé, on ne sait pas où les missiles se trouvent. Mais tout cela on doit le savoir si on doit dire : « il faut que vous limitiez la construction de missiles, vous ne devez pas les déployer là ». Comment peut-on vérifier si on ne connaît pas leur capacité ? Et ils ne vont pas les révéler comme ça. Donc je pense que l...