Des dizaines de milliers de Slovaques s’apprêtent à descendre à nouveau dans la rue ce vendredi 7 février pour manifester contre le gouvernement de Robert Fico. Critiqué pour sa politique trop servile envers la Russie, le Premier ministre a déjà évoqué des menaces de coup d’État contre lui avec l’aide de l’étranger, dans ce pays frontalier de l’Ukraine.
De notre correspondant à Bratislava,
Avec déjà 60 000 manifestants fin janvier dans la capitale slovaque, Marian Kulich estime qu’il faut mettre davantage de pression sur le pouvoir en place. Il fait partie de l’organisation Paix pour l’Ukraine, fondée il y a près de trois ans, juste après l’invasion russe : « En allant récemment à Moscou pour rencontrer Vladimir Poutine, notre Premier ministre a lancé une campagne contre Bruxelles, dénonce-t-il. Cela ne nous convient pas du tout, nos valeurs ne doivent pas être trahies pour la Russie. La Slovaquie est l’Europe : c’est le slogan de notre manifestation ».
En allant jusqu’à évoquer — sans preuves concrètes — la menace d’un coup d’État fomenté contre le gouvernement, le Premier ministre slovaque Robert Fico et ses alliés d’extrême droite dénoncent des manœuvres de l’opposition progressiste, des médias et « des ONG financées par l’étranger ». Et ce, sur fond de crise avec les autorités ukrainiennes à propos des livraisons de gaz russe et de crise gouvernementale. « Le gouvernement ne dispose pas d’une grande majorité au Parlement et le Premier ministre doit mobiliser l’électorat, souligne le politologue Tomas Strazay. Je pense que sa rhétorique anti-ukrainienne et pro-russe est un moyen pour lui de mobiliser son électorat. »
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Une société diviséeLa société slovaque est singulièrement divisée, comme en témoignent les résultats des récents scrutins. Pour Ingrid, retraitée mais toujours employée, il n’est pas question d’aller manifester aujourd’hui : « Je ne participerai pas. J’ai voté pour le parti Smer du Premier ministre et je considère qu’il veut s’assurer qu’on ait du gaz, défend-elle. Moi, j’ai 63 ans et je dois continuer de travailler même si je suis à la retraite pour pouvoir payer mes factures et mes courses, à cause de l’inflation. Et ça ne me plaît pas. »
Psychologue sociale et trentenaire, Veronika, en revanche, compte bien venir au rassemblement contre Robert Fico et son gouvernement : « Il nuit à l’image de la Slovaquie à l’étranger et au sein de l’Union européenne, en s’alliant aussi avec le Hongrois Viktor Orban. C’est difficile avec mes proches, avec mes parents par exemple qui votent pour Fico et pour le président Pellegrini, comme mes amis qui habitent dans l’est de la Slovaquie. Je vois les choses différemment et c’est comme si chacun avait sa vérité. »
Organisées dans la capitale et de nombreuses autres villes de Slovaquie, les manifestations du jour pourraient fragiliser encore un peu plus la coalition gouvernementale en place depuis un an et demi.
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