Il y a deux ans à la COP, les pays du monde entier se sont engagés à progressivement se passer des énergies fossiles qui sont les grandes responsables du réchauffement climatique. Sauf si les cheminées des usines polluantes sont équipées de système de capture de dioxyde de carbone (CO2), des technologies qui intéressent les industriels, mais qui sont loin d'être des solutions miracles. Ces dernières coûtent cher et sont critiquées par les ONG environnementales.
Dans un immense hangar, près de Lyon, s'active tout un écosystème de chercheurs dont l'objectif est de décarboner les usines européennes. Blouse blanche sur les épaules et lunettes de protection sur le nez, Patrice Font se tient devant une série de machines, parcourues de gros tubes et de tuyaux de métal. Il s'agit, en modèle réduit, d'un système qui pourrait équiper les futures centrales à charbon ou les incinérateurs de déchets pour réduire leurs émissions de dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère.
« Il y a énormément de nouvelles centrales qui sont encore construites et donc l'idée, c'est de proposer une technologie avec laquelle on peut continuer à utiliser du charbon, produire de la chaleur, de l'électricité. Par contre, le CO2 n'est plus rejeté dans l'atmosphère », explique le chargé de projet à l'IFP Énergies nouvelles (IFPEN).
Concrètement, la combustion du charbon est optimisée pour que, en sortie de cheminée d'usine, la fumée contienne plus de 95% de CO2. Il est alors possible de transporter ce gaz pour le stocker à plus de 800 mètres sous la terre. « Pour l'Europe, en 2050, c'est 450 millions de tonnes de CO2 par an qui devront être captées, stockées ou utilisées si on veut atteindre la neutralité carbone », détaille Raphaël Huyghe responsable du programme Captage et stockage du CO2 à l'IFPEN. Soit presque les trois quarts des émissions de la France sur un an. Mais derrière cette belle promesse, peu de projets voient le jour, admet-il : « Cette technologie, aujourd'hui, a un coût. Les industriels doivent intégrer ce coût. Il faut donc supporter cette filière afin qu'elle puisse avoir une viabilité économique. »
Et pour l'instant, le captage et le stockage de carbone est surtout poussé et financé par les industries pétrogazières, selon le Réseau Action Climat, qui regroupe plusieurs ONG environnementales. « Cela permet de garantir à cette industrie le "business as usual" et de pouvoir se "teinter de vert". Mais ce sont des technologies qui n'ont pas encore totalement démontré leur efficacité. Avec le risque que les financements publics dédiés à la transition écologique viennent financer ces technologies au lieu de financer d'autres leviers de décarbonation. Il faut aussi tenir compte du fait que le captage de carbone ne va venir régler que le problème du carbone. Cela ne règle pas tous les autres problèmes environnementaux liés aux énergies, que ce soit dans le secteur de l'énergie comme dans le secteur de l'industrie », estime Aurélie Brunstein, responsable de plaidoyer au sein du réseau.
Les scientifiques du Giec considèrent tout de même que le captage et le stockage de carbone fait partie des solutions pour décarboner certains secteurs industriels très polluants comme la cimenterie, la sidérurgie, l'industrie chimique. Mais uniquement lorsqu'il n'y a pas d'autre solution.
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