À l'occasion de la journée mondiale contre les mutilations génitales féminines (6 février), un collectif de femme organise une marche via un train Paris-Marseille pour éveiller les consciences en ce qui concerne les dégâts physiques et psychologiques de l'excision ou de l'infibulation. Vivant à Marseille, la comédienne ivoirienne Naky Sy Savané est la présidente du collectif des Femmes africaines contre l'excision. Elle est la cheville ouvrière de ce train, qui samedi 8 février, conduira les militantes de cette cause de Paris à Marseille pour une grande campagne de sensibilisation. Dernière victoire en date pour cette association féminine, qui a milité avec d'autres : le rejet cette année d'une loi visant à légaliser l'excision en Gambie. « C'est quelque chose qui m'avait révolté » explique la comédienne. « C'est pour cela que j'ai lancé ce mouvement, qui est le Collectif des femmes africaines contre l'excision. Nous avons mené cette bataille et pour une fois, les femmes africaines ont eu gain de cause. Donc nous aimerions quand même que cela soit su parce que, là, ils ont décidé de surseoir à cette loi. C'est une première victoire pour nous, femmes africaines, on a envie que cela se sache. On a envie de dire que : "oui ! les femmes africaines se sont levées, un jour pour dire non à la légalisation et qu’elles ont été entendues !" et nous attendons d'autres victoires encore ». Parmi celles qui remportent des victoires et qui décrivent par leurs écrits, la douleur ressentie d'une lame tranchant un clitoris : Aminata Traoré, excisée dans sa plus tendre enfance. Cette écrivaine ivoirienne prendra part à cette campagne de sensibilisation entre Paris et Marseille le 8 février. Fière de briser le mur du silence« Moi, je suis déjà une victime et j'ai pour habitude de dire que je ne suis pas fière d'être une victime de l'excision. Mais je suis fière d'avoir eu le courage de briser le mur du silence. Si ce témoignage-là peut permettre de sauver ne serait-ce qu'une fille, alors j'aurais déjà gagné notre bataille, c'est ça le plus important pour moi. Et donner aussi de la force à toutes ces survivantes, parce qu'elles sont partout. On les retrouve aussi en France, un peu partout... C'est leur donner de la force pour dire que le couteau brûlant, ce couteau-là, c'est l'instrument qui sert à la pratique. Mais on peut transformer ce vécu, ce drame en une force pour aller de l'avant, celle de donner de la voix. C'est ça ! »Donner de la voix et aussi se doter de lois contre l'excision : depuis 1998, l'Assemblée de Côte d'Ivoire par exemple, à légiférer pour interdire ce genre de pratique. Législation et éducation sont les deux principes sur lesquels AminataTraoré compte pour faire disparaitre l'excision. « Véritablement l'action des activistes, des féministes est portée. Donc il faut toujours continuer. Et moi, par exemple, je travaille beaucoup en milieu éducatif à travers mon concept : le livre comme moyen de sensibilisation. Comme j'ai écrit une œuvre autobiographique, le couteau brûlant, je me sers du livre comme moyen de sensibilisation en milieu scolaire parce que je me dis, les meilleurs relais au niveau de nos familles, ce sont les enfants, ce sont les élèves parce que eux-mêmes, ils vont porter, ils vont porter aussi leur voix à leurs parents pour dire que aujourd'hui, il faut bannir cette pratique parce qu'elle a plus de conséquences. Soyons optimiste ! ».Hommes sensibilisés, beaucoup plus utilesSensibiliser dans les écoles, mais aussi interpeller dans une société patriarcale, ceux qui sont concernés tout autant que leurs femmes ou leurs filles : les hommes. Ghislain Coulibaly et le président du Réseau des hommes engagés pour l'égalité de genre en Côte d'Ivoire. Il procède régulièrement à des rencontres avec les autorités religieuses ou les chiffres de village pour faire évoluer les mentalités. « Ce que nous, nous constatons. C'est que lorsque les hommes sont sensibilisés, ils sont beaucoup plus utiles parce que c'est eux qui ont le pouvoir. Lorsque les hommes deviennent des alliés ou des partenaires, alors ils se dressent contre toutes les pratiques de violences basées sur le genre, notamment les cas d'excision ».L'excision, une pratique qui est encore la vie dure en Afrique et ailleurs. Selon l'Unicef, cette année, il y aura trois millions de petites filles ou d'adolescentes à travers le monde qui passeront entre les mains d’une exciseuse.À écouter aussiLa vallée du Nil, aux origines de l’excision